Antonio Pigafetta

Antonio Pigafetta  (le narrateur)



Le jeune lieutenant Antonio Pigafetta fut l'un des 18 survivants de ce Premier Tour du Monde.
Natif de Vincenze, (1491) en Italie, il accompagne en Espagne le nonce apostolique Francesco Chiericati dont il est le secrétaire. Sa recommandation lui permet d'embarquer au grade de lieutenant. Pigafetta prendra soin, tout au long du voyage, de noter les événements : observations tant psychologiques des caractères que description de la vie à bord. Il rédigera un "lexique des langues indigènes"  intitulé Vocable des Géants de Patagonie qui constitue le premier relevé du vocabulaire téhuelche connu. Il établira également un dictionnaire de la langue des peuples gentils des îles Malluques.

Son journal de bord est un témoignage historique de première main. Prolixe, il est écrit sur le vif. C'est un reportage, dans toute sa force, sa vitesse et son rythme. La sincérité de son récit ne fait aucun doute. Il n'épargne aucune vérité. Sa plume ne rend compte qu'à elle-même. Il n'écrit pas pour un public qu'il s'agirait de séduire. Seule compte la relation exacte des événements. Que les hommes souffrent de la faim, qu'ils mangent les rats, qu'ils se mutinent, tout cela il en parle. Il mentionnera la violence de la répression ordonnée par Magellan pour mater la mutinerie, assistera à l'exécution des meneurs. Mais relèvera l'humanité profonde de son capitaine qui porte lui-même secours aux blessés. Ses descriptions des peuples rencontrés, de leurs mœurs, rites et traditions observées à chaque escale, constituent de précieux documents ethnologiques qui ne subissent aucune distorsion, le regard du chroniqueur étant singulièrement pur. Rien, en effet, ne semble surprendre le jeune reporter dont le tempérament paraît étonnement trempé. Ne bénéficiant d'aucun avantage particulier à bord, il est prié de se rendre utile. Partageant la vie de l'équipage, souffrant comme lui, il se bat, l'épée à la main, endure le froid, la tempête au large du Cap de Bonne Espérance et connaît le désespoir dans la longue traversée de l'Océan Indien. Il voit mourrir un à un ses compagnons. Ne sachant s'il survivrait à cette aventure, il n'en tient pas moins son journal avec régularité, s'accrochant à la plume comme un exercice quotidien de survie, tout en restant discret sur lui-même.

À son retour, Pigafetta est reçu chevalier de Rhodes en 1523. Il publie son journal, rédigé en italien, mêlé de dialecte vénitien et d'espagnol, truffé de vocabulaire recueilli dans les îles Philippines. L'exemplaire le plus ancien de son œuvre, datée de 1525, se trouve à la bibliothèque Ambrosienne, à Milan.

Enrique de Malacca


Au témoignage rapporté par Antonio Pigafetta, complété par des éléments issus du carnet de bord du pilote Francisco Albo et des lettres de Magellan, il a paru indispensable d'insérer une perspective inédite en contrepoint : celle d'Enrique de Malacca, de son vrai nom Panglima Awan, que Magallan acheta en Inde. Sans doute originaire des îles Philippines (Cebu) dont il maîtrisait la langue, il accompagna Magellan pendant près de 15 années. Il le suivit au Portugal, puis en Espagne. Il s'embarqua sur la Trinidad, la nef amirale. Magellan, par une disposition testamentaire, avait prévu son affranchissement. Étant revenu à son point de départ bien avant que les Européens n'aient achevé leur voyage, c'est l'esclave Enrique, de toute évidence, le premier homme ayant accompli le Tour du monde. En illustration sonore, le contrepoint d'Enrique, donné en Tagalog, restitue cette vérité encore peu admise.